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Chronique Livre :
HORS CADRE de Stefan Ahnhem

Chronique Livre : HORS CADRE de Stefan Ahnhem sur Quatre Sans Quatre

prix de la révélation du polar suédois


L'auteur

Stefan Ahnhem est un écrivain suédois qui est d’abord connu pour son travail de scénariste, en particulier sur la série Wallander. Il a écrit deux romans policiers dont le personnage principal est Fabian Risk, mais seul le premier, Hors cadre est jusqu’à présent disponible en traduction française. Une adaptation de ses romans pour la télévision est en cours.


De quoi ça parle ?

Fabian Risk, un policier aux méthodes pas toujours orthodoxes, vient de partir de Stockholm avec sa famille pour s’installer dans la petite bourgade de son enfance. Un peu pour repartir du bon pied avec sa femme Sonja, un peu aussi parce qu’il a eu pas mal de soucis dans son ancien commissariat…

C’est l’été et il compte en profiter pour passer du temps en famille, mais un meurtrier en décide autrement, puisqu’un homme est retrouvé les mains coupées, et qu’il apparaît bien vite qu’il s’agit d’un ancien camarade de troisième de Fabian, comme en atteste la photo de classe retrouvée sur le corps.

Le voilà prié de donner un coup de main à ses collègues plus vite que prévu, ce qui n’arrange pas ses affaires et crée des tensions domestiques. Le mort, il s’en souvient, était un sale type qui s’acharnait, avec un de ses copains, sur un garçon de la classe… et justement, le copain en question est retrouvé mort, lui aussi, les pieds avec lesquels il aimait tant frapper ses victimes sectionnés à la cheville…


Un petit extrait

« Fabian entra dans le commissariat de police flambant neuf, construit au bord de la route E4, non loin de la vieille et imposante prison du quartier de Berga. Il se dirigea vers l’homme qui était assis à la réception, derrière le guichet sur lequel étaient empilés les quotidiens locaux et nationaux du jour.

UN PROF DE TRAVAUX MANUELS TORTURÉ À MORT DANS SA CLASSE

Un gros titre typique du Kvällsposten. Était-ce l’article que Sonja avait lu ? Le Helsingborgs Dagblad avait opté pour une formulation plus sobre, mais les deux photos étaient presque identiques. Elles avaient été prises de loin, laissant voir une nacelle élévatrice et la voiture de Jörgen garée devant l’école. La plaque d’immatriculation était certes floutée, mais la couleur rouge sang du bâtiment et son enfilade de petites fenêtres révélaient sans grande ambiguïté de quel établissement il s’agissait. Et combien de profs de travaux manuels pouvaient bien y exercer ? » (p. 38 et 39)


Alors, donc :

Si vous deviez vous souvenir de tous vos camarades de troisième, le pourriez-vous ? Probablement pas. Mais si deux d’entre eux étaient retrouvés assassinés d’une façon particulièrement atroce, là, j’imagine que la mémoire vous reviendrait assez vite. C’est un peu ce qui arrive à Fabian Risk, le nouvel inspecteur de la police de Helsingborg qui vient de s’installer avec sa femme et ses deux enfants, dont un ado taciturne et accro aux jeux vidéo ainsi qu’à la musique de Marylin Manson – on a les adolescences qu’on peut – et ses collègues le pressent de venir se joindre à eux, bien qu’il soit encore en vacances, pour rechercher le meurtrier un brin sadique qui semble avoir des comptes à régler avec la classe de 3ème C.

Ça tombe mal, parce que Fabian est en train d’essayer de recoller les morceaux avec Sonja, sa femme, artiste peintre, et qu’ils avaient projeté de passer du temps tous les quatre ensemble, une vraie famille qui va à la plage et profite de l’été.

Un drôle de type Fabian, qui a dû quitter son ancien poste à Stockholm suite à un gros scandale, et qui n’aime pas beaucoup travailler autrement qu’en solo. Il n’hésite pas longtemps à franchir les limites autorisées et s’attire par là même critiques et ennuis.

À Helsingborg, on travaille tous ensemble, on partage les infos et on s’appuie les uns sur les autres, et Fabian a du mal à s’intégrer à cet esprit de groupe mais il est indispensable à l’enquête puisqu’il a fait partie de la 3ème C. Déjà deux visages barrés sur la photo de classe, deux amis qui avaient pris un autre élève comme cible, lui faisant subir un martyre quotidien absolument insoutenable : coups, humiliations, crachats, insultes… tout est bon pour assouvir leur désir de violence.

Ce sont les deux bourreaux qui sont les premières victimes. La première, Jörgen Palsson, est retrouvée dans le collège où il avait été élève et où il enseignait, mais ses mains sont disposées un peu plus loin, comme si on voulait attirer l’attention sur sa propension à s’en servir.
Son ami, Glenn Granquist, se servait, lui, de ses pieds. On le retrouve sur son lieu de travail, les chevilles bien proprement sectionnées.

Bien sûr, les premiers soupçons se portent sur leur ancienne victime, Claes, surtout qu’après l’avoir laissée tranquille quelques années, ils l’ont retrouvée 11 ans plus tard et se sont acharnées sur elle, dans un paroxysme de violence et de barbarie qui a duré 5 heures - qu’ils ont filmé comme ils ont filmé pas mal de leurs saloperies, c’est ce genre de personnes-là - au terme desquelles c’est miracle que Claes ne soit pas mort. Il a réussi à se faire soigner et a dû être opéré plusieurs fois, au visage en particulier. Après quoi on perd sa trace.

Petit à petit, Fabian se souvient de sa classe, de cette année-là. Il se rappelle que tout le monde savait ce qu’endurait Claes, les professeurs y compris, mais que personne ne venait à son aide. Fabian se sent mal à l’aise, il détournait les yeux plutôt que d’intervenir, comme beaucoup, par lâcheté, bien sûr.

Alors cette enquête, il ne la lâche pas, quitte à tirer beaucoup sur la corde dans son couple - son absence exaspère sa femme et rend son fils de 14 ans malheureux - et quitte à se mettre à dos ses nouveaux collègues qui n’apprécient pas sa façon de travailler seul à la limite de la légalité. Il s’aperçoit qu’une des pistes qu’il suit le mène au Danemark, mais que la police danoise refuse de collaborer avec leurs homologues suédois, en refusant de donner les éléments de preuves en leur possession, en retardant le cours de l’enquête de leur côté, en mettant le maximum de bâtons dans les roues de leurs collègues. Exaspérés par ces lenteurs ridicules et mesquines, Fabian, et Dunja, une inspectrice danoise, vont travailler ensemble, à l’insu de leur collègues, prenant tous les risques pour l’établissement de la vérité.

Et des risques, il y en a, car les morts s’amoncellent, à la fois parmi les anciens de la 3ème C mais aussi côté Danois, quand le tueur s’est senti en danger. Fabian, après avoir été un temps suspecté, est-il le prochain sur la liste de l’insaisissable meurtrier ?

L’intrigue est tortueuse et très complexe, le tueur est un vrai sadique qui met en scène ses crimes, avec imagination et raffinement. Bien sûr, il y a un lien avec cette fameuse 3ème C, mais lequel ? Et Fabian réussira-t-il a le voir à temps ?


La musique ? Amis des années 80, elle est pour vous !

Outre la sélection ci-dessous, sont évoqués également The Ark, Kiss, The Who, Duran Duran et Marylin Manson.

Sade - Your love is King

The Cure - High

of Montreal – Disconnect the Dots

Radiohead - Hail to the Thief – 2+2 = 5

Midge Ure & Mick Karn - After a Fashion

Kate Bush - Running up that Hill


HORS CADRE - Stefan Ahnhem - Le Livre de Poche - 666 p. mars 2018
Traduit du suédois par Marine Heide

photo : Helsingborg - Pixabay

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