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Chronique Livre :
LA FILLE DE LA PEUR d'Alex Berg

Chronique Livre : LA FILLE DE LA PEUR d'Alex Berg sur Quatre Sans Quatre

photo : Alep


L'auteur :

Alex Berg, alias Stefanie Baumm est une romancière allemande née en 1963. Elle a commencé par être journaliste avant d'écrire des romans.
Elle publie son premier roman en 2006 qui inaugure une série avec le commissaire de police Armin Stahl. Puis, sous le pseudonyme Alex Berg, elle écrit des thrillers plus politiques.


Ce que ça raconte, en vitesse :

Marion Sanders, 48 ans, est une jeune femme un peu perdue : elle doute de sa relation avec Paul, elle vient de quitter un poste de médecin-chef dans une clinique pour rejoindre Médecins sans Frontières dans une zone instable. 

Elle vient passer quelques semaines de formation à Paris avant d'aller rejoindre son poste à l'étranger et est hébergée par de vieux amis qu'elle connaît depuis l'enfance, Louise et Greg.

Chez Louise, elle retrouve aussi Jean, le neveu de Louise, qui amène chez sa tante une petite fille syrienne mutique : Zahra. Il a promis à sa mère de veiller sur elle.

Parallèlement, Claude Baptiste, des services secrets français, ainsi que ses homologues israéliens et syriens, s'intéressent de très près à Jean et à cette petite fille...


Un extrait :

« Baptiste sentait de nouveau la poussière, son cœur se mit à battre et il commença à transpirer. Cela revenait toujours et toujours, et la plupart du temps d'une façon complètement inattendue. Une perte de contrôle qui le perturbait et l'irritait à la fois. Il se força à revenir au présent, à ce logement social à Paris, et observa les garçons qui les regardaient timidement derrière le dos de leur père. Avec leurs pantalons de jogging distendus, leurs T-shirts et leurs tennis, ils étaient habillés exactement comme les enfants d'Alep, mais ce que vivaient ceux-ci leur serait épargné. Ils grandiraient en sécurité. Cependant, qu'ils soient plus heureux et qu'ils aient plus de chance dans la vie, Baptiste en doutait. Leur culture ne serait acceptée ni en France ni en Europe et, quand ils seraient grands, ils seraient tout autant étrangers à leur propre patrie et à ses traditions. » (p. 16 et 17)


Ce que j'en dis :

Marion flotte dans sa vie sentimentale et professionnelle, elle ne sait plus très bien quelles décisions prendre. Les nouvelles réformes du milieu hospitalier lui déplaisent et elle veut redonner du sens à son travail. Elle décide de s'engager dans Médecins du monde, évidemment pour un salaire dérisoire par rapport à celui qu'elle gagnait en tant que médecin chef de son service. Son compagnon, Paul, se moque d'elle, il ne comprend pas ce qui la pousse à renoncer à une vie aisée et confortable et à s'exiler ainsi. Ces deux-là ne parlent plus beaucoup, ils n'arrivent plus à savoir quoi se dire. C'est donc en plein doute que Marion arrive chez Louise et Greg, un couple âgé franco-américain très très chic, très très fortuné aussi et sans enfant. Elle a souvent vécu chez eux, ce sont des amis de son père dont elle est très proche. Ayant perdu sa mère tôt, Louise est ce qui se rapproche le plus d'une figure maternelle pour Marion qui est à un moment de sa vie où elle a besoin de réconfort et de tendresse.

Survient Jean, le neveu de Louise. Un type ultra séduisant, avec cet air de mystère et de danger qui le rend attirant en diable. Et il n'est pas seul, il est accompagné d'une toute petite fille de cinq ans, qu'il présente comme venant d'un camp de réfugiés Zahra, syrienne, sans papiers, sans parents, qu'il confie à Louise et Greg. Elle refuse de parler bien qu'elle comprenne sans aucun doute la langue française. Sans être précisément sauvage et difficile, Zahra est distante et a du mal à accorder sa confiance. Marion se sent touchée par cette petite fille et tente de s'en rapprocher et de l'apprivoiser.

Jean, on sait tout de suite qu'il cache tout un tas de sales petits secrets et qu'il trempe dans des affaires pas nettes. Il est d'ailleurs activement recherché par Claude Baptiste, qui travaille avec la DGSI à propos de trafics de réfugiés clandestins, car il est en cheville avec des Syriens influents qui détiennent des secrets d'état qui se monnayent très cher. Claude Baptiste a encore des souvenirs de guerre, à Alep en particulier, qui le hantent ainsi que ceux de sa captivité assortie des tortures qu'on imagine. Pour retrouver Jean, Baptiste s'adresse à un informateur syrien réfugié en France : Zahit Ayan qui ne lui livre aucun renseignement. Très vite, celui-ci est retrouvé mort et son corps porte des traces de torture.

À partir de là, les événements s'enchaînent : Jean est enlevé et séquestré, un attentat est commis contre le ministre de l'intérieur. Baptiste mène son enquête autour de la mort de Zahit et recherche activement Jean dont il soupçonne fortement l'implication. Un peu comme dans la série Homeland, les services secrets français, israéliens et syriens s'affrontent ou s'allient suivant les circonstances, dans un jeu de pouvoir occulte à géométrie variable, une sorte de tangram politique ultra sérieux et excessivement dangereux.

Parallèlement à ces événements, Marion vagabonde, incertaine de son cœur comme de ses désirs réels. Elle rencontre Baptiste, qui vient se renseigner sur Jean, tombe un peu sous son charme de baroudeur désabusé et malin et surtout elle tombe sur la photo, dans une exposition, d'une femme qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau.

Elle aussi mène son enquête, elle cherche à connaître l'identité de cette femme et cette quête finit par l'obséder.
Bien sûr elle va trouver et bien sûr cette découverte a un lien avec Jean, avec Zahra, avec elle-même. Bien sûr.

A la fois roman intimiste et thriller politique, La fille de la peur va de rebondissement en rebondissement vers la mise au jour de secrets intriqués les uns dans les autres. Le roman n'approfondit ni les personnages ni les événements et en reste souvent à quelque chose d'un peu rapide au risque d'une légère caricature : le personnage de Jean, par exemple dont on ne connaît pas les motivations réelles, tout ce qui concerne le secret que découvre Marion qui est expédié en quelques paragraphes, Baptiste dont la carrière est tracée à grands traits tout comme sa psychologie mais la lecture en est agréable et divertissante.


LA FILLE DE LA PEUR - Alex Berg - Éditions Jacqueline Chambon - Actes Sud - 265 p. mai 2017
Traduit de l'allemand par Jacqueline Chambon

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