Quatre Sans Quatre

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Mallock, l'interview

Mallock, l'interview sur Quatre Sans Quatre

Mallock, c'est un cocktail savamment dosé : un poil de San-Antonio au langage un peu plus châtié, un gros brin de Sherlock avec déduction et toxicomanie légère, un soupçon de Gaston Leroux que la chambre fut jaune ou pas, quelques pincées de Simenon et le tout noyé du talent de Jean-Denis Bruet-Ferreol, un auteur qui jongle avce les références comme il le fait avec les différents domaines dans lesquels il s'exprime, peinture, vidéo, musique ...

Servez frais ou chaud, peu importe, ça décoiffe et il est impossible de lâcher une fois entamé. Essayez, vous verrez, c'est addictif mais il n'y a aucun risque d'overdose. Même si les romans sont bien noirs, il y transpire une bienveillance et une joie de vivre rafraîchissante, une empathie communicative qui fait du bien de temps en temps.

Les Larmes de Pancrace, le dernier opus, mêle habilement Moyen-âge, culture du vin, mystère du crime en vase-clos et scandale politique, pas de quoi découragé Mallock qui aime les défis et ne rechigne jamais à filer un coup de main à un ami dans la mouise.

Quatre Sans Quatre a eu envie d'en savoir un peu plus et a cuisiné pour vous le fameux commissaire qui a eu la gentillesse de nous répondre sans que nous ayons besoin de laisser tomber par inadvertance des annuaires sur sa tête, merci à lui !


De multiples casquettes, toutes dans un registre artistique, c'est du à une grande curiosité ou à des difficultés à trouver le meilleur moyen de s'exprimer?

J’aime toutes les façons qui nous sont données de créer, de l’invention à la peinture, en passant par la musique et bien sûr l’écriture, à laquelle je me consacre depuis l’âge de 12 ans, soit … un demi-siècle … Arrrgl !

En fait, à bien y réfléchir, depuis tout petit, je ne fais qu’une seule chose : « écrire ». Parfois c’est sur un piano avec des notes, parfois sur un écran d’ordi à l’aide de pixels, parfois, au pinceau sur une toile, ou avec des mots sur une feuille de papier.

Une seule finalité : transmettre des sensations, des sentiments, des émotions …


Quelles sont tes grandes références dans le domaine du polar ou du roman noir? Ceux qui ont nourri Mallock?

Peu dans le polar-thriller, en dehors de Sherlock Holmes ou Thomas Harris… Je suis surtout nourri de fantastique, avec des écrivains comme Lovecraft, Seignolle, Bradbury ou Jean Ray et de littérature blanche : Céline, Cohen, Gracq, Garcia Marquez …

À ce sujet, je pense que ce qui définit le mieux mes livres n’est ni le terme de polar ni même celui de thriller, mais plutôt l’expression désuète de « littérature policière » à laquelle je tente de redonner une toute nouvelle vigueur en la nourissant au lait du cinema et des séries américaines, comme Dexter ou True Detective.


Tu écris en suivant un schéma détaillé et précis des événements où y a t'il toujours une place pour te surprendre toi-même en cours d'élaboration d'une enquête?

Les deux, cher général “Quatre sans quatre”. J’élabore avant tout un plan béton et rentre dans une recherche documentaire poussée, qui peuvent me prendre une année. Seulement après, je me lance avec gourmandise, affamé, dans l’écriture elle-même.

Là, libre aux personnages ou aux situations de me dire éventuellment que j’avais tort, et tordre ou enrichir ce jolie plan par leurs suggestions.


Dans la série l’œuf et la poule, qui est arrivé en premier : l'histoire de Pancrace ou l'affaire contemporaine ?

Ah, ah, bonne question. En fait, j’ai eu envie, pour une fois, d’écrire une « Petite barbarie » pour changer de mes longues « Chroniques barbares ».

J’ai donc rédigé en deux mois un roman de quelques 300 000 signes (250 pages) dans lequel je parlais du meurtre qui se déroule de nos jours et de son reflet en 1960. Ça marchait certes, mais … “Moi, pas content ” et Amédée non plus.

La dimension mythique des autres aventures me manquait. J’ai alors décidé de revoir ma copie en donnant une ampleur historique à la narration, jusqu’à situer l’origine du mal au Moyen-âge ! Près de 400 000 signes plus tard, Amédée a fini par me dire qu’il était satisfait de moi.


Revisiter le mythique crime en vase clos ne doit pas être une mince affaire. C'est la solution qui t'a donné envie de t 'y attaquer et de faire pâlir de jalousie Gaston Leroux ?

Si Gaston Leroux vivait encore, ç’aurait certainement été cette dernière motivation (j’ai un très mauvais fond). Mais, là, non.

Ça vient d’une autre de mes petites manies : me lancer à moi-même des « chiches, t’es pas cap » Au bout de plus de 40 années d’écriture, il faut parfois pimenter les choses… Comment ça ?… Comme en amour ? Je vous laisse la responsabilité de cette métaphore douteuse (rire)


Même si Amédée est constamment confronté au deuil de son fils ou aux difficultés de ses enquêtes, il projette un énorme appétit de vie, une gourmandise rabelaisienne. C'est aussi la philosophie de l'auteur ? Rien n'est jamais perdu tant qu'il y a du souffle ?

Dans la vie, on se bat, on se débat, et ça devient notre vie, non ? Je suis amoureux fou de ma liberté, et j’ai appris à ne jamais céder. Ni aux compromis, ni aux compromissions, et à traverser les deuils et les champs de bataille.

Toujours foncer devant sans se soucier du prix à payer. On n’aura jamais la Paix, la chasse aux connard est ouverte toute l’année. À ce sujet, puisqu’on parle de bouffe, j’adore la tête de veau, les oursins, les ris de veau et les « Grouses ».


C'est bien tombé cette actualité des écoutes de l'ex président et la stratégie mise en place pour sa défense, exactement la même que celle de Sophie Corneille pour discréditer le juge et les flics. Tu t'étais inspiré de faits réels plus anciens?

Les exemples ne manquent pas. Avec des médias irresponsables, au sérieux et à la déontologie branlante, toute manipulation devient un jeu d’enfant pour peu que l’on possède un peu de pouvoir.

Mentez, discréditez, lancez des rumeurs, il en restera toujours quelque chose. Le dogme « Il n’y a pas de fumée sans feu » est une arme redoutable. Le dénigrement dure trois mois, le démenti fait trois lignes. Le phénoméne est plus général, l’avénement des Médias est aussi et surtout celui du Mensonge institutionnalisé et de la Médiocrité triomphante.

La politique, comme la musique, comme la charité ou les livres sont devenus des objets de consommation. D’ailleurs, ce n’est pas le talent dont toutes ces tristes sires vont bientôt manquer, mais d’espace publicitaire.


Amédée est reparti en chasse ? Nous allons avoir bientôt de ses nouvelles?

Oui, lui et moi, nous n’arrêtons pas.

Pour ma part, je (je dis « je » parce que le commissaire Amédée Mallock ne fout pas grand chose) suis en train de finaliser l’ultime version du « Massacre des Innocents » qui sortira en Septembre chez Pocket. J’écris le N° 5 depuis un an, une histoire hallucinante avec un méchant hors normes, et je suis en train de construire le synopsis détaillé du N°6, encore pire !

Bon je vous laisse, y’a des hommes en blanc qui semblent m’attendre avec une grande voiture et de jolies lumières de toutes les couleurs. Il serait question de schizophrénie, je crois ??? N’importe quoi!


Le teaser des Larmes de Pancrace réalisé par Mallock (juste avant l'internement ;-)

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